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René Grégoire – Graveur pour les caisses d'épargne

La médaille des conférences des caisses d'épargne

 

Monument important du thème des jetons et médailles des caisses d'épargne, cette grande médaille hexagonale apparaît en 1935-1936, pour les conférences des caisses d'épargnes qui, à cette époque, fêtent le centenaire de la création des caisses sous le statut de 1835. Elle est attribuée aux administrateurs et agents cumulant au moins quarante années de service et sera émise dans le cadre des conférences régionales et des conférences générales. Elle sera reprise à diverses occasions, le plus souvent dans le cadre d'hommages rendus lors de ses conférences.

À l'avers, le buste du fondateur, Benjamin Delessert est représenté, tenant dans sa main droite une plume et dans sa main gauche une feuille de papier. Elle constitue un hommage au « fondateur des caisses d'épargne et à ses continuateurs ». On la retrouve en bronze, bronze argenté et bronze doré, en argent et en vermeil pour la conférence générale, toujours d'un module de 60 mm.

 

 

Pour les conférences régionales, on l'a retrouvée en bronze et en argent pour de nombreuses régions (Alsace – Lorraine, Est et Nord, Nord Ouest, Midi et Sud Est, Centre, etc...).

Plus tardivement, dans les années 70, une ré-édition en est faite pour l'union nationale et les unions régionales avec un revers différent, moderne, qui tranche beaucoup avec la facture années 30 de l'avers. Dans cette édition, la légende en haut à l'avers est faite sans le « à » rendant la phrase du dessous incorrecte.

D'autres ré-éditions seront faites pour le centre national des caisses d'épargne, pour les caisses régionales après les regroupements des caisses municipales et pour la société régionale de financement. On les trouve généralement en bronze. Enfin, les caisses de Guéret et de Versailles ont également repris le thème, avec un revers spécifique pour Versailles.

Sans autre information, on se contenterait de cette description qui suffit, à elle seule, à rapprocher le fondateur des collaborateurs les plus zélés des caisses. Elle constitue une médaille honorifique très proche des médailles du travail. Pourtant, en recherchant un peu plus loin, ce portrait a tout une histoire et peut, en premier lieu, être rapproché d'un timbre, émis en 1835, qui reprend très exactement la figuration et pour cause, ce timbre étant du même auteur.

René Grégoire, le graveur

 

Né le 4 juin 1871, à Saumur, il intègre les Beaux-Arts et est l'élève de l'atelier Ponscarme. Il est reçu 1er grand prix de Rome, en 1899, et intègre la Villa Médicis jusqu'en 1903. Entre 1900 et 1935, il est l'auteur de différentes médailles et timbres dans des thèmes variés :

Graveur, sculpteur et dessinateur de timbres, il sera professeur à l'école nationale des Arts décoratifs. Au cours de sa carrière, il participe, sans succès, à plusieurs concours monétaires sous la IIIème et la IVème République.

En 1919, il est nommé conseiller technique aux beaux-arts pour la mairie d'Angers.

 

On sait, des archives de la ville, qu'il est l'auteur d'une plaquette, en 1927, pour la 49ème fête fédérale de gymnastique ayant pour thème une Angevine. Il est également l'auteur de la médaille de la ville en 1932 et de projets reprenant le thème de l'Angevine pour cette même médaille entre 1945 et 1950. C'est le troisième thème qui aurait été retenu mais ne sera pas ré-édité.

Ce thème tient une place particulière pour la numismatique des caisses d'épargne puisque René Grégoire l'a également utilisé pour un jeton de la caisse d'Angers. Outre l'image de l'Angevine à l'avers, il aura un traitement particulier, au revers, pour l'allégorie de l'épargne, incarnée par une femme portant une corne d'abondance et guidant la figure angevine sur le chemin de la prospérité.

Si on ne date pas avec précision la création de ce jeton, on sait qu'il remplace le modèle gravé par Auguste Patey, vraisemblablement en 1899. Ce jeton se retrouve assez facilement en argent et plus rarement en bronze. Certains exemplaires en argent ont été retrouvé en boite, d'autres ont la date « 9-4-51 » gravée en creux sur l'avers en bas. Cette dernière information laisse supposer que ce jeton a pu également servir de médaille commémorative.

 

Dans l'ensemble, le traitement des sujets est marqué par la période Art déco. Le premier plan en représentation romantique, richement détaillé, est presque systématiquement rehaussé d'un fond paysagé, légèrement estompé, qui donne une certaine profondeur à l'ensemble.

 

Une histoire dans l'Histoire

 

Pour revenir à la médaille figurant Benjamin Delessert, il y a, autour de ce projet, une histoire particulière. En effet, la commande, tout autant du timbre que de la médaille, date de 1834-35 et correspond aux commémorations, pour de nombreuses caisses, du centenaire de leur création. René Grégoire, Saumurois de naissance, est également sculpteur et se voit commander, par la Caisse d'épargne de Saumur, dès octobre 1930, une sculpture du fondateur destinée à orner la place de l'Arche dorée. Pour financer sa réalisation, la Caisse de Saumur fera appel à l'ensemble des Caisses, elles seront 360 à participer.

 

L'auteur se met au travail et proposera une composition globale comprenant la statue en pied de Benjamin Delessert, de 2,1 m, ainsi que les ornements du piédestal, à savoir un haut relief en marbre de 1,8 m, évoquant les vertus de l'épargne et quatre bas reliefs en bronze évoquant la vie de Delessert. En elle même , la statue représente Benjamin Delessert une plume dans la main droite et une feuille qu'il est en train de relire dans la main gauche.

 

On retrouve la même symbolique que pour le timbre et la médaille. Mais les discours d'inauguration du monument, le 23 septembre 1934, nous en apprennent un peu plus. Benjamin Delessert est représenté en train de rédiger son testament lequel, digne du philanthrope qu'il était, lègue quelques 150 000 francs (or !) en bons d'épargne à l'attention de 3 000 ouvriers.

La représentation du haut relief est, quant à elle, très significative du message de vertu porté par l'institution, message pour lequel Delessert et La Rochefoucauld se sont battus avec acharnement tout au long de leur vie. Aucune image des bas reliefs n'est à ce jour connue et il se pourrait que cette information soit définitivement perdue puisque l'histoire de ce monument se termine en février 1942, quand les forces d'occupation réquisitionnent les métaux stratégiques. La statue et les quatre bas reliefs sont démontés et expédiés en Allemagne où ils ont très vraisemblablement été fondus. Quoique des projets de remplacement aient été proposés, aucun n'a vu le jour.

 

L’œuvre monumentale aura survécu jusqu'à nos jours grâce à quelques cartes postales et des médailles qui ont été, jusque dans les années 80, éditées et distribuées au personnel des Caisses.

Références et crédits photographiques

© 2017 par Christophe CHARVE

@Joseph-Henri Denécheau - http://saumur-jadis.fr

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